La Oranje, tu l'as quittée juste avant la coupe du Monde 78 en Argentine, non sans avoir participé aux matches de qualification. Officiellement pour des raisons politiques, en réaction contre la junte militaire du général Videla. Mais le motif est plus personnel et répond à une tentative de kidnapping avant la fin de ton contrat à Barcelone. « J'ai eu un fusil pointé sur ma tête, j'ai été ligoté, ma femme aussi, et mes enfants étaient présents dans mon appartement, finis-tu par avouer sur Radio Catalunya en 2008. Il y a des moments où d'autres valeurs priment dans la vie. Pour jouer une Coupe du monde, il faut être à 200%. » Tu l'étais quatre ans auparavant. Mais le Kaiser et ses troupes te collent du plomb dans l'aile, toi le « Hollandais volant », au stade olympique de Münich. Abattu en plein vol alors que le trophée te tend ses bras dorés. Beautiful loser avec la sélection. Champion total avec ses clubs de toujours.
D'abord
avec l'Ajax où tu débutes dès l'âge de 17 ans, épais comme un
haricot et déjà virevoltant, plein d'une grâce naturelle. Sous les
ordres de Rinus Michels, celui qui rend plus funky le WM '74, tu
inventes le football total et remporte tes premiers succès
nationaux. Il y en aura un paquet de clopes bien rempli au final,
étalés sur trois décennies (8 championnats et 5 coupes). Tu
deviens alors roi d'Europe, grâce au travail dans la continuité
mené par le Roumain Ștefan Kovács, qui succède à Michels parti
pour Barcelone. Trois succès consécutifs en coupe d'Europe des
clubs champions (1971,72 et 73) et te voilà désigné ballon d'or à
trois reprises (1971, 73 et 74). Une première pour un joueur.
Football total et rien pour les autres ! Et tout ça avec les
cheveux longs, les pattes d'eph et les rouflaquettes à Neeskens,
surnommé Johan II parce toi tu es le premier.
Au
soir de ton dernier succès européen sous le célèbre maillot à bande rouge, tu quittes les canaux embrumés
pour le soleil de la Catalogne, où tu rejoins ton mentor à
Barcelone. Le début d'une histoire d'amour avec ta seconde patrie.
Tu as tout fait chez les Blaugranas, à commencer par remporter un
titre de champion dès ton arrivée (1974) après 15 ans de disette
au Camp Nou. Mais c'est en qualité d'entraîneur que tu connais
finalement la consécration avec le Barça, en soulevant la coupe aux
grandes oreilles (1992). La première du club catalan qui te doit
tant aujourd'hui. Comme le football en général, car avant toi, il
n'y avait rien, sans zlataniser mes propos.
Puis
tu as connu ton quart d'heure américain au sein de la disco NASL,
entre strass et paillettes, pour échapper au fisc espagnol et te
refaire financièrement. Trois à quatre paquets de cigarettes par
jour, et on grille aussi son compte en banque. Sans se consumer sur
le pré néanmoins. Pour ton retour aux Pays-Bas, à l'approche de la
retraite, tu glanes tes derniers succès dans un final tour avec
Feyenoord (coupe et championnat 1984). Baisser de rideau triomphal.
Tu nous quittes un 24 mars, toi qui restes à jamais le porteur du numéro
14 sous le maillot orange.
0 Commentaires