BIO EXPRESS DEGRADABLE. Ramaz Shengelia (1957-2012).


La nouvelle est tombée, et passée presque inaperçue à l'heure où l'Euro 2012 battait son plein, Ramaz Shengelia est décédé le 21 juin dernier d'une crise cardiaque à l'âge de 55 ans. Quelques jours après le décès de Thierry Roland qui a ému la France du foot, la Géorgie pleure à son tour la disparition d'une figure locale. Une sorte de héros au pays qui laisse un grand vide derrière lui. Notamment pour son ex-coéquipier et ami d'enfance, l'international soviétique vice-champion d'Europe 1988 Tengiz Sulakvelidze, encore bouleversé par l'émotion et la fin tragique de son copain : « Je n'arrive pas à croire que Ramaz n'est plus là. Il est mort dans la nuit alors qu'il était dans sa datcha ». Sa base de retraite où il aspirait à une ville tranquille et modeste, jouissant du statut de vice-président honoraire de la fédération géorgienne. Un titre offert sur un plateau pour services rendus un mois avant sa disparition.

Ramaz Shengelia débute sa carrière au Torpedo Koutaïssi en 1971. C'est là, dans cette ville rude et laborieuse - la deuxième du pays en population derrière Tbilissi - perdue entre la plaine et les glaciers du Caucase où l'on apprend d'abord à former les hommes (et les esprits) avant d'en faire des sportifs disciplinés, qu'il voit le jour un 1er janvier 1957. Dans une région située à la frontière de l'Europe et l'Asie au sein d'un petite république incorporée à la grande URSS, l'attaquant joufflu trouve un esprit d'indépendance grâce au football et son mentor de l'époque, l'entraîneur Carlo Khurtsidze qui le repère dès l'âge de 14 ans. A Koutaïssi, Shengelia découvre les bases de la formation à la Soviétique. Un travail axé sur le collectif, la rigueur et le sens du devoir: les principes de la réussite au pays des Soviets. Pendant quatre ans, Ramaz suit les conseils de son professeur - « Il m'a tout appris, à jouer le ballon dans n'importe quelle position, à penser sur un terrain et respecter l'adversaire. Il m'a beaucoup donné humainement ». Des valeurs qui suivront toute la carrière de l'attaquant géorgien, laquelle se poursuit naturellement vers le grand club du pays, Dinamo Tbilissi, à l'heure de l'émancipation. Accompagné de son ami Sulakvelidze et de Kostava, le trio s'impose dès sa première saison (1977) et confirme l'année suivante avec un titre de champion d'URSS à la clé. Une belle réussite collective qui n'exclut pas les distinctions personnelles. Au terme de la saison, l'hebdomadaire « Football-Hockey » lui décerne le trophée de joueur de l'année du championnat soviétique. Une consécration pour ce jeune talent qui réédite sa performance en 1981, l'année où Dinamo Tbilissi remporte la coupe des coupes face à Carl Zeiss Iena (2-1) dans une finale 100% Europe de l'Est. Entre ces deux trophées, Shengelia devient aussi un pilier de la sélection soviétique. Appelé une première fois en mars 1979 (contre la Bulgarie) juste avant de remporter la coupe d'URSS, le Géorgien participe trois ans plus tard à la coupe du Monde en Espagne. Un souvenir mitigé pour Ramaz - l'URSS est éliminée au second tour - qui reste sur la déception de son but (valable) refusé contre le Brésil : « Mais pourquoi l'arbitre n'at-il pas validé ce but ? Il était très important pour moi de marquer contre les Brésiliens ». L'attaquant se console en marquant face à l'Ecosse mais le mal est fait. Shengelia, alors au sommet de sa carrière internationale (26 sélections, 10 buts de 1979 à 83) ne connaîtra plus la joie de participer à un tournoi majeur malgré la qualification de l'URSS pour le mondial 86. A cause peut-être de son équipe, dominée au palmarès par Spartak Moscou et Dynamo Kiev. 

A la fin des années 80, Ramaz Shengelia s'exile dans l'anonymat du championnat suédois à IFK Holmsund (1989-90). Une saison blanche avant de retourner au pays et prendre un temps en main la direction technique de la sélection géorgienne. Et se retirer peu à peu du football après sa mission avec cette modestie qui le caractérise : « Je ne suis pas un homme riche sur le plan financier. Ma seule richesse, c'est l'amour et la chaleur que les gens m'ont apporté durant ma carrière. En Géorgie et partout ailleurs ». Elevé à la dure, Ramaz était un homme à se contenter de peu. Il aspire désormais à une paix royale. La dernière chose qu'on puisse au moins lui donner.


Enregistrer un commentaire

0 Commentaires